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Le Japon et son racisme commun

Compte tenu de la tendance à la dépopulation du Japon, l’immigration devient rapidement un moyen indispensable pour soutenir sa population vieillissante. Mais la forte homogénéité génétique des Japonais, notamment liée à leur insularité (à l’exception des Ainu récemment reconnus), peut sans le savoir favoriser des formes de discrimination plus ou moins importantes.

En tant qu’Occidentaux blancs au Japon, les situations les plus courantes sont sans aucun doute les suivantes :

– Vous êtes automatiquement supposé être américain, ou du moins parler anglais, donc on vous adresse en anglais ;

– Si vous habitez au Japon, cela signifie que vous êtes professeur de langues (anglais ou français une fois votre francophonie déclarée) ;

– Comme vous ne devriez presque rien savoir de la culture et de la langue japonaises, ils vous félicitent comme un enfant quand vous mangez avec des baguettes ou dites arigatô.

Ce ne sont pas de mauvaises formes de préjugés, certainement pas destinées à nuire ou vice versa, mais elles sont tout de même épuisantes pour les expatriés bien intégrés. La relation avec les Noirs est peut-être plus insidieuse, du moins des préjugés souvent plus forts que les Japonais ne comprennent parfois pas (car ils en rencontrent moins, surtout à la campagne). Quant aux half, ces Japonais métis, leur intégration parfaitement légitime en
pose souvent problème, comme le suggèrent de nombreux témoignages.

Discriminations en tous genres

Plus graves sont les 右翼団体 uyoku dantai, ces groupes d’extrême droite qui font grand bruit chaque 11 février (février de la fondation de l’Etat) lorsqu’ils se « rassemblent » à Yasukuni, sanctuaire à Tokyo. Toute l’année on les voit déambuler dans les villes à petite vitesse dans leurs 街宣車 Gaisensha, vans et autres bus noirs décorés de drapeaux japonais ?? (ou encore le drapeau de la marine japonaise), d’où ils chantent via des mégaphones leurs discours de haine et autres musique militaire à travers leurs nationalistes, appelant notamment au retour d’une véritable armée japonaise. Ces révisionnistes des exécutions japonaises pendant la Seconde Guerre mondiale sont bien connus de certains pour leur affiliation à des groupes de yakuza. Pour votre information, le parti Jiminto de Shinzo Abe, actuellement au pouvoir au Japon, est de centre-droit.

Au Japon, il n’y a qu’une loi contre les discours de haine ou la discrimination depuis 2016, mais sans réelle sanction ni interdiction, donc en pratique, cela laisse beaucoup de latitude pour précisément ce type d’actions. Cependant, une jurisprudence de 2013 basée sur la Convention internationale des Nations Unies a condamné l’un de ces groupes, Zaitokukai, à plus de douze millions de yens (~ 89 131 €) de dommages et intérêts pour discrimination raciale. Gageons que cela calmera quelque
brûlures malodorantes.
Stop racism
Parce que les cibles les plus courantes des nationalistes japonais aggravés sont les Coréens Zainichi 在日韓国人, la plus grande minorité de l’archipel, d’une nation avec laquelle le Japon entretient une relation longue et compliquée. Par exemple, au printemps ? 2013, de vives manifestations ont éclaté à ShinOkubo, le quartier coréen près de Shinjuku, faisant rage anti et anti-anti ! Au moment de sa première cet été, le film d’animation The Wind Rises de Hayao Miyazaki avait suscité de vifs débats en ligne ? sur la position pro-militariste ou anti-patriotique du réalisateur, selon que les critiques venaient d’un côté ou de l’autre de la mer du Japon…

Pour donner un exemple de racisme au Japon envers une japonaise d’origine belge, Amélie Nothomb, une célèbre autrice a subi le racisme dans des transports en commun. « Combien de fois me suis-je assis à côté de quelqu’un dans le métro de Tokyo et ai-je vu cette personne se lever de dégoût et dire à son voisin : « Ces Blancs sentent si mauvais ». Je suis d’accord que j’étais certainement la pire employée du monde, mais ce n’était pas
pour ça », dit-elle. Ses beaux-parents ne s’en sortaient pas beaucoup mieux non plus. « Je me suis fiancée à un Japonais absolument adorable, ma belle-mère était consternée. »

Anne-Elisabeth Lemoine l’invite alors à parler du temps où l’écrivain était petit et il y avait aussi un exemple flagrant de racisme. « Dans ma petite enfance, j’étais le seul homme blanc à l’école japonaise. Et à la fin de la récréation, ils m’ont trouvé parmi tous les autres gosses qui m’avaient déshabillé parce qu’ils voulaient voir si j’étais blanc partout. C’est intéressant d’être aussi l’objet de racisme : on sait quelles sont les conséquences », explique le
. « La peur de l’autre est partout », ajoute-t-il, faisant écho à Manu Katché, lui aussi victime de racisme, et à Carla Bruni, qui se souvient de la fois où il a vu Naomi Campbell être traitée comme « Al Capone » dans un aéroport canadien.

Le dernier exemple est dans une publicité au Japon où Nike dénonce les brimades et le racisme, notamment envers une fille d’origine africaine et une autre fille d’origine coréenne. Le but : promouvoir la tolérance. Mais ce n’était pas du goût de tout le monde et les réactions étaient très variées. Sur YouTube, 50 000 « J’aime » contre 30.000 « Je n’aime pas », de nombreux internautes ont accusé la marque de chaussures d’être « anti-japonaise » pour balayer la question du racisme.End racism

Au-delà de l’origine, c’est le poids constaté récemment à Osaka dans cet exemple anecdotique où chaque kilo de locataires (spécialement les femmes) en plus ou en moins sur la balance se transforme en 1.000¥ (~7.43€) ajoutés ou déduits lors du calcul du loyer !

Quoi qu’il en soit, il serait tout à fait inapproprié de voir l’éclat dans les yeux du Japon sans le mettre en perspective avec tant d’éclairs à travers le monde. D’autant plus qu’en tant que touriste de passage vous n’avez guère la chance de vivre une quelconque forme de racisme au Japon, bien souvent au contraire.

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